Aya de yopougon, tome 4 - La revue de presse

Publié le 18/12/2008 N°1892 Le Point

Bande dessinée - Aya toujours au top

La série qui balaie les clichés sur l'Afrique revient. Décoiffant.

Romain Brèthes


La merveilleuse saga de « Aya de Yopougon » (prix de la BD du Point 2007) se bonifie encore avec le temps. Ce soap opera ivoirien met en scène une galerie de personnages remarquablement riches et complexes. L'héroïne éponyme de la série doit ainsi faire face à un professeur d'université plus qu'entreprenant. Hervé, l'amoureux transi de la belle Félicité, a toujours « le malheur pour deuxième prénom », selon la jolie expression de Rita l'amazone. Quant à Mamadou, il fait le gigolo auprès de riches femmes pour subvenir aux besoins de son fils. Mais c'est surtout d'Innocent que vient la nouveauté. Débarquant à Paris chez un cousin, il voit la dure réalité de la vie urbaine occidentale le rattraper (il découvre avec stupéfaction dans le métro que « les Blancs aussi demandent l'argent » et que la pauvreté n'est pas l'apanage de l'Afrique). C'est de ses talents de coiffeur et de créateur que viendra la lumière, puisqu'il enverra des hordes de Grace Jones vêtues de léopard à l'assaut de la capitale, au grand désarroi des maris de ces dames. Le trait lumineux de Clément Oubrerie et les dialogues débordant de vitalité de Marguerite Abouet dressent un portrait réaliste de tout ce petit monde et balaient avec un plaisir communicatif les clichés qui s'attachent encore à cette Afrique si proche et si lointaine

« Aya de Yopougon », vol. 4, de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie (Gallimard BD, 128 pages, 16,50 E).




Vendredi 05 Décembre 2008

Les tourments d'Aya

Par Adeline FLEURY
le JDD.fr
>"> C'est avec délice que l'on retrouve la belle Aya de Yopougon et tout son petit monde. On ne s'ennuie pas à la lecture de ce quatrième tome qui se décline entre pérégrinations parisiennes et cancans d'Abidjan. Rien ne manque. Du sucre, du sel, et beaucoup de poivre pour un volume plus sombre et plus profond. A déguster sans modération.

Festival d'Angoulême 2006. Le public bédéphile fait la charmante connaissance d'une jeune ivoirienne gironde et clairvoyante, sérieuse, toujours de bons conseils pour ses amies. Elle s'appelle Aya, et cette année-là, elle remporte le prix tant convoité du Premier album. Côté critique, les éloges pleuvent sur cette chronique sociale sensible, pleine d'humour et de saveur, véritable concentré de sons et de couleurs ultra vitaminées. Deux ans et trois tomes plus tard, Aya est toujours là, pétillante certes, mais avec la joie de vivre en moins. La jeune femme devenue étudiante en médecine découvre le machisme et son lot d'injustice. A l'université, elle doit subir les assauts d'un professeur de biologie vicieux qui impose à Aya un chantage malsain: soit elle se plie à ses désirs, soit elle sera recalée à ses examens.

Innocent a quitté Yopougon pour Paris

Parallèlement, on suit les pérégrinations d'Innocent, le coiffeur branché de Yopougon, parti tenter sa chance à Paris. Il connaîtra la dureté de la rue, la promiscuité des foyers de travailleurs africains avant de trouver, au black, un travail dans un salon de coiffure afro. Mais il se rend compte que Paname n'est pas l'eldorado. Et que tout quartier populaire qu'il soit, Yopougon lui manque cruellement. Et il s'en passe en son absence. La petite Félicité, confidente d'Aya, forte de son récent titre de miss Yopougon est devenue l'effigie d'une marque de produits de beauté, son visage est affiché partout dans Abidjan. De quoi attiser la convoitise de son paysan de père qu'elle connaît si mal. Normal, le vieil homme a vendu sa fille lorsqu'elle n'était qu'une enfant aux parents d'Aya.

D'autres problèmes noircissent le quotidien du petit monde d'Aya mais pour une fois, la bonne Aya ne sera pas à l'écoute. Elle est trop occupée à échafauder une vengeance à l'encontre de son horrible professeur de biologie. Si le propos est plus dur, plus profond, plus noir, que dans les tomes précédents, le tragique est habilement habillé d'humour, avec une langue toujours aussi pimentée, celle de l'Ivoirienne Marguerite Abouet. Quant au trait expressif du dessinateur Clément Oubrerie, il s'enrichit d'une gamme plus sombre, plus glacée, conférant aux séquences parisiennes une puissante densité dramatique. Malin, poétique, sensible, ce quatrième tome est fidèle au reste de cette brillante série. Tout simplement humain.

Aya de Yopougon, tome 4, Marguerite Abouet, Clément Oubrerie, Gallimard, 16,50 euros.






Aya de Yopougon - tome 4
La critique
[evene]
La note evene : 4/5La note evene : 4/5 par Mikaël Demets

Bienvenue à Paris ! Innocent, sosie ivoirien de Michael Jackson - si, si ! - débarque dans la capitale hexagonale. En plus de rendre cet album encore plus dense qu’à l’accoutumée, Marguerite Abouet profite de cette incartade parisienne pour donner une nouvelle ampleur à son récit. Les nuits à la belle étoile, les foyers d’accueil, les patrons véreux, le travail au noir, les combles minables loués hors de prix… La scénariste, sans jamais se départir de son humour, utilise le décor parisien pour doubler son intrigue d’une dimension sociale jamais caricaturale. Parallèlement aux (més)aventures métropolitaines d’Innocent, Aya et compagnie continuent à s’embrouiller au pays. Derrière l’ambiance sémillante et colorée de la Côte d’Ivoire, Marguerite Abouet esquisse les contours d’une société que l’on n’a finalement jamais eu l’occasion d’approcher de si près. Imbroglios amoureux ou histoires plus tragiques sont traités avec la même légèreté intelligente, qui permet à l’auteur d’aborder tous les sujets, même les plus graves (abus sexuel, autorité paternelle dictatoriale), avec une aisance étonnante. Drôle, souvent sarcastique et pleine de dérision, la trame d’‘Aya de Yopougon’ trouve en plus dans le dessin insouciant de Clément Oubrerie le soutien idéal. Quelques dictons exotiques désopilants pour compléter le tableau, et nous voilà sans doute avec entre les mains, le volume le plus accompli de la série.





Didier Pasamonik - ActuaBD

Abouet et Pahé, talents d’Afrique

Avec la parution de son quatrième volume, Aya de Yopougon de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie (Gallimard, collection Bayou), distingué dès 2006 par le Prix du premier album à Angoulême, apparaît de plus en plus comme une évidence, une grande œuvre chorale qui fait découvrir l’essence africaine avec complexité et intelligence, mais surtout avec une vitalité sans égale qui recombine la tradition avec les codes importés du monde occidental.

Chez Abouet, la chronique sociale est précise, documentée, imprégnée de comédie (on pense à Albert Cohen ou à Pagnol), écrite dans une langue telle qu’on la parle en Afrique et qui surprend par son invention, sa couleur et son authenticité. Ce grand succès de librairie (déjà 140.000 exemplaires vendus) qui doit également au dessin discret mais en même temps très habile du Parisien Clément Oubrerie, devrait se confirmer avec ce quatrième tome qui met en scène Innocent, « coiffeur pour dames stylées », venu à Paris pour y faire carrière. Il ne tardera pas à découvrir que la vie à Paname est « dure comme un caillou ». Les aller-retour entre l’Europe et l’Afrique renforcent encore davantage l’effet de décalage de ce récit passionnant truffé de rebondissements et de scènes cocasses.

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Marguerite Abouet et Clément Oubrerie recevant leur prix en 2006.
De g. à dr. Benoit Mouchard, Jean-Marc Thévenet, Marguerite Abouet, Clément Oubrerie et Lewis Trondheim. Ph : D. Pasamonik (L’Agence BD)

La saga du quartier de Youpougon ne devrait pas s’arrêter là puisqu’un dessin animé devrait en être tiré dont le script a été présenté au dernier Festival de Cannes et dont le producteur n’est autre qu’Autochenille productions, la maison de prod de Joann Sfar et de… Clément Oubrerie.

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Aya de Yopougon T4 : Innocent, "garçon stylé" fringué comme Michaël Jackson, decouvre Paris
par Marguerite Abouet et Clément Oubrerie ’Gallimard, coll. Bayou)






BD - AYA DE YOPOUGON #4, de Abouet & Oubrerie

Après 3 tomes passés dans le quartier de Yopougon, en Côte d’Ivoire, cette nouvelle aventure se divise entre la pluvieuse et toute grise ville de Paris et la lumineuse Abidjan. Un contraste très rigolo et saisissant, qui casse les illusions d’Innocent, garçon coiffeur récemment émigré. Côté Yopougon, la pauvre Aya paye le calme des premiers tome de manière un peu abrupte… Ça surprend ! Reste que l’humour et la dérision sont toujours très présents, notamment à travers 2 pages de roman-photo jubilatoires. Superbe.
En deux mots : Innocent de Paris
De Marguerite Abouet & Clément Oubrerie, aux éditions Bayou-Gallimard - 128 pages - 16,50 €

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